Vulgarisation de la liquidation de succession en présence de donations ou legs
Par principe, tout ce qui est donné avant le décès ou bien légué est réintégré dans la succession pour vérifier qu’un héritier ne soit pas lésé.
Comment s’opère dans ce cas le calcul que le Notaire va faire : par la liquidation de la succession, qui sera particulière en cas de donations ou de legs.
1ER étape : établir l’actif successoral
C’est la photographie du patrimoine du défunt au jour du décès.
On y regroupe donc :
- les biens existants au décès
- ceux dont il est propriétaire à titre de biens propres
- ceux qu’il recueille dans la liquidation de la communauté de biens pouvant exister avec son conjoint survivant
- ou bien la moitié indivise des biens dont il est propriétaire en indivision
- diminués des dettes du défunt au jour du décès
Mais il existe une particularité que nous allons voir si des donations ou des legs ont été effectués.
2ème étape : vérification de la « réserve héréditaire » 912 du Code Civil
Une partie du patrimoine est « bloqué » : il s’agit de la réserve héréditaire
Celle-ci dépend du nombre d’héritiers réservataires (c’est-à-dire des descendants)
C’est la part qui doit leur revenir obligatoirement.
Par exemple, en présence d’un enfant, la réserve est de ½, donc l’autre ½ est libre. En présence de 2 enfants, elle sera de 2/3, donc 1/3 sera libre.
A côté de cette part, il y a une part libre du patrimoine, « la quotité disponible ».
Cette partie peut revenir à n’importe qui, héritier ou non, selon l’envie du défunt. La seule limite est de ne pas priver les héritiers réservataires de leur réserve.
3ème étape : que faire en cas de donation ou bien de legs ?
Si le défunt a consenti des donations avant son décès (dons manuels, donations, donation-partage, …), ou bien s’il a légué certains biens par testament, il convient donc de vérifier que ces libéralités n’ont pas entamé la réserve des héritiers.
En 1er, le notaire va imputer le montant des donations, en commençant par la plus ancienne pour remonter jusqu’à la plus récente.
Cela permettra de vérifier si l’héritier à qui ces donations ont été faites a déjà reçu sa part dans la succession du défunt.
Si le défunt a consenti de son vivant des donations dites « en avance de part », on ajoute la valeur des biens donnés dans l’actif successoral. Cela signifie que le défunt a voulu faire une donation qui s’imputera sur la part de l’héritier, c’est à dire sur sa part réservataire.
On va rajouter cette donation à la masse des biens de l’actif successoral (état au jour de la donation, valeur au jour du décès, et non de la donation) et vérifier qu’elle est la part de chaque héritier réservataire. L’on parle de « réunion fictive ».
Si un héritier a reçu plus, et que l’autre ne peut pas avoir la part de sa réserve, celui qui a reçu la donation excédentaire devra une soulte à l’autre.
Si celles-ci ont été faites « hors part successorale », c’est un plus que le défunt a voulu donner, on les impute donc sur la part de la quotité disponible.
Enfin, si le défunt a consenti une donation-partage, elle ne sera pas rapportable à la succession, car elles sous-entendent un partage anticipé.
Le résultat correspond à l’actif net successoral
Ensuite, il s’agira d’imputer les legs, les libéralités faites qui s’exercent au décès.
Si le leg a été fait au profit d’un héritier bénéficiant d’une réserve (par exemple à l’un des enfants), on déduira sa part du montant de ce legs.
S’il a été fait à un autre héritier, ou à un tiers, l’on vérifiera qu’il ne dépasse pas le montant de ce que le défunt pouvait disposer sans entamer la réserve, donc sur la quotité disponible.
Si cette libéralité ne dépasse pas la quotité disponible, les héritiers réservataires ne peuvent s’y opposer : il s’agit de la part dont le défunt pouvait disposer librement.
Si ce legs dépasse la quotité disponible, cela voudra dire qu’il viendra diminuer la réserve, ce qui n’est pas possible. Il conviendra donc de réduire ce legs, à hauteur de la quotité disponible, sans qu’il ne grève la réserve. Il est prévu une action dite « action en réduction » pour que les héritiers réservataires puissent demander à réduire cette libéralité excessive. Cette réduction pourra s’effectuer en valeur, et dans certains cas en nature.
4ème étape : quid de la liquidation en présence d’un conjoint survivant ?
Que ce passe-t-il si en plus de descendants, le défunt laisse un conjoint survivant ? Celui-ci n’est pas réservataire, en présence de descendants, mais a des droits légaux.
Ses droits légaux sont les suivants :
- en présences d’enfants communs : il peut choisir entre ¼ en pleine propriété ou bien l’usufruit de tous les biens
– En présence d’enfants non communs, c’est-à-dire d’un premier lit, le conjoint a des droits légaux de ¼ en pleine propriété.
Or, le défunt peut vouloir favoriser au delà de ses droits légaux son conjoint survivant.
Une quotité disponible spéciale, c’est-à-dire étendue, a été reconnue en présence d’un conjoint survivant.
Cette quotité disponible spéciale lui ouvre un choix :
- soit la quotité disponible dont le défunt aurait pu disposer
- Soit ¼ en pleine propriété et ¾ en usufruit
- Soit l’usufruit de tous les biens
Si une donation, ou un legs, a été consentie par le défunt au conjoint survivant, cette libéralité s’imputera sur cette quotité disponible spéciale.
Récemment, la cour de cassation a pu rappeler que le principe de cette imputation se faisait en valeur, notamment en ce qui concerne des libéralités faites en usufruit, lesquelles doivent être valorisées en capital pour pouvoir vérifier qu’elles ne dépassent pas la quotité disponible spéciale entre époux.